Comment rater son étude de marché Seniors (en confiance)

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Une étude de marché mal posée peut ruiner un projet. Voici comment éviter les erreurs classiques sur le marché des Seniors et ne pas tomber dans le piège des fausses données.


Quand l’expertise devient un piège

Il y a quelques années, j’ai accompagné un promoteur immobilier qui voulait se lancer sur le marché des logements pour seniors. Le directeur marketing, diplômé d’une très grande école de commerce et passé par un grand groupe américain, était convaincu de savoir ce qu’il fallait faire.

Objectif : comprendre les besoins des seniors à la retraite. Et surtout, quantifier le marché potentiel de ceux qui envisagent de déménager après leur départ en retraite.

Sur le papier, tout semblait cohérent. Sauf que…

Vouloir déménager ≠ déménager

Poser la question « Pensez-vous déménager à la retraite ? » à une personne de 55 ans semble logique. Sauf que cela revient à confondre une intention vague avec une action réelle.
Car vouloir déménager dans 10 ans, ce n’est pas prendre en compte :

  • L’attachement émotionnel à son logement actuel,
  • Le réseau social de proximité (voisins, amis),
  • La difficulté à se séparer de biens accumulés (et pas que matériels),
  • La peur du changement et de l’isolement,
  • Les imprévus de santé ou financiers…

Bref, c’est ignorer les facteurs explicatifs du comportement réel. Ces facteurs ne sont pas dans les réponses immédiates, mais dans les résistances profondes qui se révèlent dans le temps.

Résultat ?
Alors qu’en réalité, à peine 10 % des retraités déménagent, plus de 50 % ont répondu “oui” dans l’étude. Un facteur de surestimation… multiplié par cinq. De quoi bâtir un business plan… sur du sable.

Le biais des réponses projetées

Ce cas n’est pas isolé. On le voit partout :

  • Les personnes interrogées se projettent dans un futur idéalisé.
  • Elles répondent avec leurs biais d’optimisme (pensant être en meilleure santé qu’elles ne le seront).
  • Elles oublient que leur entourage changera (des amis qui ne seront plus là, des enfants qui déménagent, etc.).
  • Et surtout, elles répondent avec les éléments connus du présent, sans intégrer les inconnues de demain.

Exemple classique :
On demande à un enfant de 45 ans s’il serait intéressé par une solution de téléassistance pour ses parents. Il répond “oui”. Logique : l’idée est séduisante.
Mais quand il devient vraiment aidant, sous stress, débordé, la priorité change. Le système sans accompagnement humain devient un fardeau. Ce “oui” initial devient un “non” catégorique.

Comment éviter ça ?

  • Ne pas poser uniquement des questions directes sur le futur (“Que ferez-vous ?”)
  • Préférer les facteurs explicatifs : ce qui, dans la vie réelle, déclenche une décision ou la bloque.
  • Travailler avec des personas vivants, c’est-à-dire intégrer l’évolution des trajectoires de vie.
  • Croiser les données déclaratives avec des données comportementales (ou à défaut, les données issues de vrais aidants, de vrais retraités).
  • Et surtout, ne pas croire que l’intention vaut engagement.

Conclusion

Une étude de marché ratée, ce n’est pas seulement une erreur de chiffres.
C’est construire une entreprise sur des illusions.
Et quand on parle des plus de 50 ans, les illusions coûtent cher.
Car ici, l’émotion, l’évolution personnelle et les trajectoires de vie comptent autant – voire plus – que les réponses rationnelles à un sondage bien présenté.


À retenir :

Ce qu’un senior dit vouloir faire n’est pas ce qu’il fera.
Ce qu’il fera dépend de son vécu, de ses émotions, de son entourage et de ses freins invisibles.
Votre mission : aller chercher les causes, pas les déclarations.